Le Verrier article AEC

Il y a 150 ans, la Météo nationale naissait à la suite d’une tempête en Crimée.

article paru dans notre revue AEC

C’est un épisode de la guerre de Crimée qui, en 1854, entraîna la naissance du premier service météorologique français. En effet, le 14 novembre de cette année-là, une très grosse tempête en mer Noire provoque le naufrage de trente-huit navires et de trois vaisseaux de guerre français et britanniques participant au blocus du port de Sébastopol.

La France et la Grande-Bretagne sont alors en guerre depuis le 27 mars 1854 avec la Russie pour l’empêcher de régner sur la mer Noire, la flotte turque ayant été détruite par l’escadre russe dans le port de Sinope, le 30 novembre 1853.

Après ce désastre, le maréchal Vaillant, ministre de la guerre, chargea Urbain Le Verrier, directeur de l’Observatoire de Paris, d’une enquête pour expliquer comment cette tempête a traversé toute l’Europe d’ouest en est, sans que personne ait donné l’alerte. Le Verrier demande alors aux astronomes et aux météorologistes européens de lui transmettre les observations qu’ils ont faites sur l’état de l’atmosphère entre le 12 et le 16 novembre. Deux cent cinquante réponses lui parviennent grâce auxquelles il reconstitue la trajectoire de la tempête à travers l’Europe.

Le 16 février 1855, , Le Verrier propose à NapoléonIII la mise en place d’un réseau de météorologie télégraphique destiné à prévenir les marins de l’arrivée d’une tempête. C’est la date fondatrice de la météorologie française.

Le 17 février, Urbain Le Verrier et M. de Vougy, directeur général des lignes télégraphiques, reçoivent l’autorisation d’entreprendre le nouveau service. Une lettre émanant du cabinet de Napoléon III stipule :« Proposez avec assurance ce que vous jugerez convenable. La question est trop importante pour que Sa Majesté ne désire pas voir vos efforts couronnés d’un plein succès. »

Le sujet est d’autant plus important que, quelques jours auparavant – le 15 février -, une tempête a rejeté un vaisseau de guerre français, la Sémillante, en route pour la Crimée sur les rochers des bouches de Bonifacio (Corse) entraînant la mort de 700 marins (aucun survivant).

TROIS OBSERVATIONS PAR JOUR

Le 19 février, Le Verrier présente à l’Académie des sciences une carte météorologique de l’état atmosphérique du jour à 10 heures du matin t,e fin février, un jeune physicien, Léon Foucault est nommé chef des travaux météorologiques.Un an plus tard, en juin 1856, l’astronome français expose devant l’Académie des ciences la répartition des tâches entre l’Observatoire et l’Administration des lignes télégraphiques.

« Il fut convenu, avec M. le directeur général De Vougy, dit-il alors, que l’Administration des lignes télégraphiques ferait recueillir les observations par ses agents, et les ferait transmettre à l’Observatoire impérial de Paris, partie par le télégraphe, partie par la poste ; tandis que, de son côté, l’Observatoire fournirait les instruments et les instructions, réduirait les observations et les ferait publier. (…) Pour ne pas trop surcharger les employés, trois observations seulement par jour ont été ordonnées à l’ouverture du bureau, à 3 heures et à 9 heures du soir, avec invitation d’observer plus fréquemment s’il était possible. »

Le réseau français d’observation météorologique estdonc rapidement établi. En dehors de la capitale, il comporte vingt-quatre points de mesure tenus par des employés de l’administration du télégraphe. Le 30 juin 1856, Urbain Le Verrier récisep à l’Académie des sciences que« le bulletin météorologique des divers points de la France, recueilli par voie télégraphique, est maintenant complet, et qu’il est publié chaque jourdans le journal du soir La Patrie ».

La France n’est pas le seul Etat à mettre en place des observations météorologiques: dès 1854, le Conseil du commerce britannique organise un département de météorologie confié à l’amiral FitzRoy et les Pays-Bas se dotent la mêmeannée d’un Institut météorologique néerlandais mis sur pied par Buys-Ballot.

C’est cependant l’organisation du réseau météorologique français qui contribue en 1857 à la création du Service météorologique international car au réseau des 24 stations françaises se joignent cette année-là une dizaine de capitales européennes qui communiquent leurs observations à l’Observatoire de Paris.

Le 2 novembre 1857 paraît le premier numéro du« bulletin (météorologique) international de l’Observatoire de Paris », qui devient quotidien à partir du 1er janvier suivant.

Par la suite, la Grande-Bretagne ayant décidé de ontribuerc à ce mouvement,  » ce bulletin collecte à partir de 1864 les données d’une cinquantaine de stations européennes et publie chaque jour des cartes synoptiques des isobares et des prévisions météorologiques ».

En 1873 le premier Congrès météorologique international se réunira, donnant ainsi corps à une idée exprimée vingt ans auparavant à Bruxelleslors d’une conférence qui réunissait dix pays : Belgique, Danemark, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Russie et Suède.

Voir également : site Internet Météo France (http://www.meteofrance.com)