Visite au fort de Saint-Cyr
Jean Coiffier
Pour satisfaire à la demande de nombreux de nos amis de l’AAM et de l’ANAFACEM, qui n’avaient pu visiter le fort de Saint-Cyr ni en octobre 2019, ni en mars 2023, l’AAM Île-de-France a organisé une troisième visite. Sera-ce la dernière ?
Le 13 mars 2025, 22 de nos membres se sont donc retrouvés à l’entrée du fort, dont une partie avaient partagé un repas convivial dans un restaurant proche de la gare de Saint-Quentin-en-Yvelines. C’est avec une certaine émotion que tous ceux qui ont effectué une partie de leurs études à l’École Nationale de la Météorologie (ENM) ont retrouvé ces bâtiments militaires enterrés, datant de la fin du XIXe siècle, et qui abrite désormais la Médiathèque du Patrimoine et de la Photographie (MPP), ainsi que des services de la Cinémathèque française préservant une importante collection de films.
Au début de la visite de la MPP, nous avons donc été accueillis par Madame Anne Cook, chargée d’études documentaires, qui a brièvement passé en revue l’histoire de cette Médiathèque, héritière de la Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine (MAP) crée autour des années 1990 (Photo 1 – L’accueil au fort par Madame Anne Cook).
Après avoir traversé une salle entrée décorée de magnifiques photos représentant des stars du siècle passé, nous avons été introduits dans une des salles d’archives qui renferment plusieurs millions de négatifs photographiques sur des supports variés. Après avoir été dûment documentés (sujet, auteur, date de prise, numéro d’ordre…), ceux-ci sont conservés dans des enveloppes en papier neutre rangées dans des boîtes métalliques de protection. Ces boîtes sont disposées sur de grandes étagères coulissantes et correspondent à plus de 7 kilomètres de linéaire, ne laissant qu’un étroit couloir pour circuler (Photo 2 – Une salle d’archives typique). Les négatifs de grande taille sont conservés dans des meubles à plans munis de nombreux tiroirs. Bien entendu, toutes les salles d’archives sont maintenues à température et hygrométrie constantes et l’air y est renouvelé tous les jours. Ce n’était pas le cas, lorsque, cinquante ans en arrière, ces salles servaient de dortoirs aux élèves qui, aujourd’hui anciens météos, redécouvrent émus ce site.
Nous avons pu aussi admirer une grande photo de l’Opéra Garnier d’environ 80 cm x 50 cm réalisée à partir d’un négatif sur plaque de verre de type bien nommé « mammouth » d’environ 12 kg. Cette photo montre la place de l’Opéra entièrement vide ! En effet en raison d’un très long temps de pose, tous les éléments mobiles (piétons calèches…) n’avaient pas le temps d’impressionner la plaque.
La médiathèque est dépositaire du fonds Nadar, ce grand pionnier de la photographie qui réalisa des portraits des personnalités de la politique et des arts et fut également le premier à monter avec ses appareils dans la nacelle de ballons pour faire les premières photos aériennes. Elle abrite aussi le fonds du studio Harcourt, où tous les écrivains, artistes et hommes politiques venaient se faire photographier pour la postérité.
Mme Cook nous a ensuite montré quelques exemplaires de photos prises au cours de la première guerre mondiale, qui constituent un témoignage de l’utilisation de la photographie pour le reportage : photos de régiments sur le front d’Orient, photos d’aéronefs ainsi que des photos des monuments de la ville de Reims bombardés, qui s’avéreront très utiles pour la restauration ultérieure des bâtiments. Nous avons pu aussi admirer de magnifiques positifs du photographe anglais contemporain Michael Kenna : nous découvrons ainsi de magnifiques photos en noir et blanc d’une plage bordée de galets, prises à plusieurs heures de la journée.
La médiathèque conserve aussi de nombreux documents graphiques du patrimoine comme les gouaches des peintures et vitraux de la Sainte Chapelle, réalisés avant leur restauration en 1840, ainsi que des plans d’architecte et divers dessins d’objets liturgiques. Enfin nous avons pénétré dans la salle abritant une bonne moitié du fonds du photographe et cinéaste Raymond Depardon, co-fondateur de l’agence Magnum, fonds en cours d’inventaire et d’aménagement. Elle contient, outre les très nombreux négatifs et planches contact, la multitude de livres et revues où les photos de l’artiste ont été publiées (Photo 3 – La salle du fonds Raymond Depardon).
Après cette visite fort intéressante, nous avons été introduits dans le « tunnel de l’Enfer », qui a rappelé à certains anciens élèves des escapades nocturnes (Photo 4 – Le tunnel de l’Enfer). Ce long couloir, aujourd’hui dégagé et éclairé, permettait de faire circuler un wagonnet pour approvisionner en munitions la batterie « Mougin » située à son extrémité qui avait été installée dans divers forts construits après la guerre de 1870 pour protéger Paris. Elle était équipée de deux canons de 155 mm qui débouchaient à l’extérieur dont les affuts reposaient sur une couronne pourvue de galets de roulement reposant sur un rail circulaire permettant ainsi une rotation de 360°. L’ensemble était mis en mouvement par l’intermédiaire d’un treuil manœuvré par 3 personnes qui sera ensuite remplacé par une machine à vapeur dont il fallait évidemment alimenter la chaudière.
Ce tunnel ainsi que les divers couloirs d’accès aux batteries annexes étaient difficiles d’accès en raison des gravats et objets divers qui les encombraient. Leur nettoyage et leur aménagement en ont fait un décor souterrain très recherché pour les prises de vues de films et de séries pour lesquelles les producteurs doivent désormais faire des réservations plusieurs mois à l’avance.
À l’issue de cette excursion souterraine, Nous nous sommes tous retrouvés dans la une salle de travail où notre hôte avait préparé pour chacun d’entre nous une pochette contenant outre la brochure de présentation du MPP, un livre de photos étonnantes du fort prises par la photographe Anne Garde, ainsi qu’un livre de photos anciennes de la ville de Mantes. Il ne restait plus qu’à prendre la traditionnelle photo de groupe sur l’escalier du bâtiment principal (Photo 5 – Le groupe AAM/ANAFACEM au complet) avant de nous séparer après avoir chaleureusement remercié tous les personnels de la MPP qui nous ont permis de faire cette émouvante visite.
Plus de photos sur notre site Joomeo.
Voir aussi : https://www.mediatheque-patrimoine.culture.gouv.fr, ainsi que la plateforme d’accès aux bases de données des Patrimoines (POP) : https://www.pop.gouv.fr.